L’histoire est une énigme, un vrai code voué à être oublié pour certains. Pour d’autre, c’est une forme de compréhension, une ultime chance de pouvoir apprendre de ses erreurs. Car, à vrai dire, si nous n’avions pas appris de notre passé, que serions nous aujourd’hui ? Toutes ces réussites du passé, comme les grandes guerres et les grandes défaites auraient servi en rien ? Chaque goûte de sang, de sueur, aurait coulé pour rien ? On pourrait décrire l’histoire comme ennuyante pour ceux qui n’y mettent pas du sien, mais qui n’a jamais aimé se faire raconter une histoire étant jeune, aussi banale soit-t-elle ? Mais l’histoire m’a permis d’être ce que je suis aujourd’hui, et je n’ai pas l’intention de renier mon passé comme je l’ai déjà fait.

[...]

Je suis né à Chicago le 4 avril 1974. Mon enfance n’a pas été joyeuse, ni triste. Il n’y avait rien d’amusant à être un enfant pour moi. Je ne jouais pas dans la rue, je ne jouais pas au G.I. Joe et je ne mangeais jamais des glaces en famille. La raison ? Mon père n’était jamais là, il n’y a que ma mère pour s’occuper de mes deux sœurs, de mon frère et de moi ! Il était toujours trop pris par son travail et cela a commencé à réellement nous affecter ma famille et moi lorsque j’ai pris conscience que ma mère dépérissait. Le pire là-dedans, c’est que j’ignorais sa maladie. Elle restait souvent des longues heures allongée dans son lit à dormir, son regard vide et éteint qui fixait la vitre sur laquelle allait s’écraser les gouttes de pluie. Puis, un matin, elle ne s’était pas réveillée. À l’âge de 11 ans, je l’avais découverte un matin et je m’étais mis à pleurer, pleurer et pleurer pendant des jours. Des larmes de peine et d’impuissance, mais surtout de rage. J’en voulais à mon père de nous avoir jamais aimés, mais la vie continuait et je trouvai bientôt des moyens pour me débrouiller tout seul.

À 15 ans, étant l’aîné de la famille, j’assumais le bonheur de toute ma fratrie. Bien sûre, mon père payait le loyer, mais c’était tout juste s’il savait qu’on existait. Je trouvais donc la nourriture dans les épiceries, je les amenais au cinéma et j’achetais des vêtements avec le peu d’argent que je gagnais de mon travail de plongeur dans un restaurant. Je leur donnais tout ce que j’avais, je me démenais comme un fou jusqu’à même délaisser mes études pour faire passer l’absence de mon père plus facilement. Bref, les années défilèrent et la fatigue eu raison de moi. Je voulais faire ma vie et c’est ainsi qu’à l’âge de 18 ans, je fis mes valises et pris un billet pour New York, passant le flambeau à mes sœurs qui étaient rendues assez vieilles maintenant. J’ai fait des études sur l’histoire des États-Unis à la New York University, un sujet qui m’intéressait depuis le secondaire. C’est ainsi que j’ai finalement atterri à Harvard, à enseigner la matière que j’aimais depuis toujours à des élèves qui, j’en doutais beaucoup, faisaient semblant de bien écouter pour ne pas m’avoir sur leur dos. Je n’en revenais toujours pas comment j’avais pu finir par être professeur, mais aujourd’hui, j’ai pris goût à mon travail et c’est ainsi que la cloche sonna pour annoncer, une fois de plus, le début des cours. ( :